La Vénus de Milo au balai

Je prends mes cours de photographie au musée, lorsque je me pose devant un Maître pour essayer de comprendre son utilisation de la composition, de la lumière, de la couleur, pour fixer l'instant et transmettre l'émotion. Mais les musées ont un deuxième intérêt : Les visiteurs, les guides, les agents d'entretien, les gardiens y jouent "de petits spectacles ordinaires" en décalage complet avec le lieu. Je m'arrête souvent dans une salle non pas pour les oeuvres qu'elle contient mais pour le ballet qui, parfois, s'y déroule.
Et puisque nous parlons de ballet...
Pour cette Vénus de Milo, après avoir médité sur trois bons angles de vue, j'attendais l'entrée en scène des acteurs. Je commençai par fixer quelques mimiques et poses de visiteurs se prenant en photo, mais rien d'extraordinaire. Je photographiais depuis une heure dix et commençais à me dire que, cette fois, la pêche n'allait pas être très bonne quand ce balayeur entra par la droite. Son nettoyage linéaire et méthodique de la salle - en partant du fond - allait, tôt ou tard, se heurter à l'obstacle du socle. Je me plaçai sur mon "repère numéro un", intéressé par la résolution du problème. Notre homme enjamba alors la petite rambarde, balaya le pourtour de Vénus et reprit sa trajectoire,tout aussi méthodiquement.



Un peu de chance rend la première photo vraiment supérieure aux deux autres :
  • Tout d'abord, elle est la seule où l'on voit le visage et il bénéficie de l'éclairage de la Vénus. J'y lis cette lassitude qui rend hermétique à la beauté.
  • Et puis ce bras... qui semble prolonger le mouvement du bras manquant de la Vénus.
L'histoire ne serait pas complète si, un mois avant, je n'avais pris cet autre balayeur qui, lui, n'a pas osé franchir la rambarde. Que peut-il se passer dans la tête de ces deux personnes pour que l'une pénètre dans un "périmètre sacré" et l'autre pas ?






La Vénus de Milo au balai